Le château La Croix de Gay : une propriété familiale à Pomerol depuis cinq siècles
c’est celle d’avoir conscience de l’importance de ce qu’ils ont en charge et de consentir au sacrifice
pour maintenir quelque chose qu’ils considèrent être plus important qu’eux même,
quelque chose qui les dépasse un peu. » (Aubert de Villaine) 1
Une famille à Pomerol depuis 1477
Le vignoble du château La Croix de Gay est actuellement mis en valeur par la famille Raynaud-Lebreton, descendante d’une lignée de vignerons pomerolais remontant à 1772 mais installée sur la commune depuis au moins 1477.
Les ancêtres de la famille Raynaud-Lebreton, Mathelin et Michel Barraud ont en effet reçu, à cette date de l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, pour exploitation, des terres au centre du plateau de Pomerol.
Ce tènement de la barrauderie correspondait aux terres des actuels Pétrus, châteaux l’Evangile, la Conseillante, Gazin, Petit Village
et Vieux Château Certan 2.
et qu’il eurent bien de la peine à faire valoir, vu la terre peu fertile, en grande partie graveleuse,
a perdu son nom qui perpétuait celui de ces courageux pionniers ;
il nous serait même inconnu sans les documents tirés des archives.
Curieux contraste, c’est aujourd’hui la partie la plus riche de la commune de Pomerol,
celle qui contient les crus de vins les plus célèbres. » 3
Une famille de vignerons depuis 1772
Alors que le XVIIIe siècle marque l’avénement des vignobles de qualité dans le libournais, en 1772 les registres paroissiaux de Pomerol précisent l’activité de vigneron de Jean Brugnet, ancêtre au sixième degré des propriétaires actuels du château La Croix de Gay.
Ceci établit donc probablement la famille Raynaud-Lebreton comme l’une des plus ancienne à mettre en valeur directement l’aptitude viticole exceptionnelle du terroir de Pomerol.
L’établissement de la marque « Château La Croix de Gay » au XIXe et XXe siècles
Durant le XIXe et le XXe siècle l’exploitation fut transmise par les femmes.
De génération en génération leurs époux se transmirent un savoir faire vigneron familial et une connaissance des terroirs de Pomerol gage de la régularité et de la qualité des vins de la propriété.
Ainsi se succédèrent :
- Barthélemy Larroucaud (maire de Pomerol de 1871 à 1874 puis de 1876 à 1883),
- Jean Angle (membre fondateur du syndicat viticole de Pomerol, maître de Chai des châteaux Gazin (M Quenedey), Rouget (M Cabanes), Certan (Demoiselles de May) et pour l’Abbé Antoine Faure, curé de Pomerol de 1861 à 1905,
- Jean Marie Barraud (maire de Pomerol de 1912 à 1919, premier secrétaire adjoint et membre fondateur du syndicat viticole de Pomerol).
Jean Angle développa particulièrement la propriété, imposant la marque Château La Croix de Gay dés la fin du XIXe siècle et n’acceptant de céder son vin qu’à des prix équivalents aux crus classés du médoc 1855.
La reconnaissance de la qualité dans la seconde moitié du XXe siècle
Noel Raynaud (1923-1997) et Geneviève Ardurat-Raynaud (1925-2009)
L’affirmation de la qualité des vins du château La Croix de Gay après la seconde guerre mondiale doit beaucoup à Noel Raynaud. Perfectionniste; désirant ce qu’il y avait de mieux pour son vin; réussissant « de façon surprenante, grâce à des vinifications perfectionnées, les millésimes moyens »4; ce travailleur acharné décrocha, au cours des années 1970, de nombreuses médailles d’or et d’argent au concours général agricole de Paris.
En 1982, le Château La Croix de Gay est admis au sein de la prestigieuse institution de l’Union des Grands Crus de Bordeaux, belle récompense pour Noel RAYNAUD qui a toujours pensé sa propriété comme une icône de Pomerol et n’aurait par renié certains des commentaires les plus évident concernant son vin :
qui évoque le plus un grand cru issu de pinot noir. » (Robert Parker)7
Cependant, en 1997, après 51 vendanges (1947-1997) et une vie consacrée à sa propriété et à l’appellation Pomerol (membre actif du syndicat et membre fondateur de la confrérie des Hospitaliers de Pomerol (1968)), Noël Raynaud rejoignit définitivement cette terre qu’il aimait tant.
Sa femme Geneviève Raynaud née Ardurat confia alors à leur fille Chantal Lebreton la charge de l’exploitation du château La Croix de Gay. Elle fût rejointe dans cette tache pour les récoltes 2009 et 2010 par son frère Alain Raynaud.
Le XXIe siècle
Après le décès de leur mère Geneviève Raynaud en 2009, Alain Raynaud et Chantal Raynaud-Lebreton prirent des chemins différents. Alain vendit sa participation dans la propriété ; Chantal, soutenue par son mari et ses enfants, choisit de poursuivre l’œuvre familiale.
Recentrée sur le coeur historique du vignoble, bénéficiant d’installations restructurée au sein de notre hameau de Pignon, entourée d’une équipe qui chaque année nous accompagne dans l’expression des terroirs et poursuit avec nous le geste vigneron, l’histoire intime de notre famille avec ce terroir de Pomerol qu’elle aime tant, se pérennise.
- Aubert de Villaine co-gérant du Domaine de la Romanée Conti, Thomas Bravo-Maza, « Quatre saisons à la Romanée Conti », France Télévisions et Compagnie des phares et balises, 2011.
- Arch de la Haute-Garonne, fonds de Malte, H. Commanderie de Bordeaux : Reconnaissance en parchemin pour Poumeyrol, de l’année 1746, reg. 982, Decazes, notaire
- Garde J. A. Société historique et archéologique de Libourne. Histoire de Pomerol. Libourne : Imprimerie libournaise, 1946. p 58.
- Bettane et Desseauve. Le Classement 99 des vins et domaines de France. Editions de La Revue du vin de France, 1998. p 143.
- Cocks Ch et Feret Ed. Bordeaux et ses vins. 11me édition. Bordeaux : Féret et fils éditeurs, 1929. p 740.
- Jefford A. Le nouveau visage du vignoble français. Hachette, 2003. p 183.
- Parker R. Guide Parker des vins de France. Solar, 2001. p 335.